samedi 24 mars 2012

Trail d'hiver de la Tribu - 2012

Trail, prise deux. Après Orford, la forêt Ouareau. Ne me demandez pas de vous mettre des petites épingles sur une carte, je ne sais pas où c'est. C'est rare que je quitte mon île montréalaise et, quand je la quitte, je me fais conduire. Par le pilote de l'avion ou par le Jipé de mon amie Pascale. Donc, voilà, c'était quelque part dans une forêt un peu bosselée par les monts.
Il faisait beau, il faisait chaud, il faisait bleu. Un bleu parfait que le brouillard nous a sorti de sa poche après l'avoir bien lustré alors qu'on était en route pour la rue des Marguerites à Chertsey, où devaient se retrouver quelques dizaines d'équipes de coureurs des bois.


Dans la voiture étaient Pascale, Jipé et moi-même, alias les Grosses Écureuilles, équipés jusqu'au plafond de l'auto. Vêtements, vivres, raquettes, skis et bâtons. Nous partions pour un 20 km de malades, comme n'arrêtait pas de s'en faire joie le directeur de la course. Parmi les malades, quelques amis prenaient aussi leur température à l'orée de la forêt, Éric la Carpe et Nico le Fou (les Bras cassés) Patrick Porte-clef, Daniel et le chien Maya (les MeurTRIs), Alex la Bédaine et Marlène (les Panthères).


L'événement était organisé au profit de la fondation DesÉquilibres qui œuvre en faveur des jeunes et du sport. J'avoue ne pas m'être beaucoup intéressée à la cause, et même pas du tout pour être tout à fait honnête, mais savoir que, pour une fois, je ne donne pas mes droits d'inscription à une banque, ça me fait très plaisir. Ça donnait en outre à la course une ambiance très conviviale, avec une organisation aux petits oignons et des bénévoles extrêmement gentils. Le chili post-course était délicieux. Je connais même un végétarien qui a brisé plusieurs années d'abstinence en y succombant. Mais pour y avoir droit, il fallait d'abord courir. On n'a rien sans rien.


Le principe de la course était de partir à deux et de finir à deux, avec le même partenaire. Et de se donner un nom d'équipe. Il y avait 35 équipes, nous étions donc les Grosses Écureuilles. Nous partîmes à trois et revînmes à deux. Pascale n'était pas sûre de pouvoir finir la course avec sa blessure au genou, Jipé venait un peu en doublure. Finalement, Pascale a fini et Jipé aussi, mais en se trompant de route avec quelques autres perdus.


La course
Départ. Trop fastoche, même pas de sloche


Quelle forêt enchanteresse les amis! Cette neige, ce soleil, cette chaleur. Splendide. Du blanc, du bleu, des arbres de bois nus, des torrents de cristal. Gambader dans la neige et avoir chaud... Au Québec, c'est rare. Journée de chaleur exceptionnelle, la première de la parenthèse estivale qui allait se poser pour quelques jours sur le Québec. Ça m'a rappelé le ski dans les Alpes, quand vous prenez le soleil sur une terrasse en haut des pistes, en pull et les pieds dans les bottes de ski. Sauf qu'on n'a jamais vu de terrasse, qu'on n'avait pas chaussé de skis ni de raquettes et qu'on n'a pas gambadé. Mais pas du tout, du tout.

Avant le départ, tout le monde se posait mutuellement la question: raquettes or not raquettes? On nous avait prévenus qu'il valait mieux la raquette que le not-raquette mais la rumeur a bruissé vers la rébellion. Fuck la raquette! Ben je me demande si c'est pas la raquette qui nous a f... Tout ça pour dire qu'il n'y eut point de gambades dans la forêt enchantée. Sacrebleu, ça sacrait/jurait dans toute les langues de la francophonie. Et le paysage m'est passé à côté des mirettes, sauf sur quelques points de vue assez stupéfiants. En gros, 90% du temps, on scrute le sol à la recherche de l'endroit où poser le pied pour que la neige ne cède pas et ne vous envoie pas au fond d'un trou. Sur les 18 km de parcours dans les bois, il y eut environ 15 km de neige auto-perforante. Il y eut aussi 100 mètres cumulés de torrents, rivières, trous d'eau, boue, qu'à tout prendre je préférais à la neige fourbe. Et 2,9 km de surface à peu près courable. (Distances à vue de nez.)



Il y eut des montées, il y eut des descentes. Des descentes à ski sans ski et des descentes à pèpète-ski avec le pète. Il y eut des montées plus faciles que les descentes. Il y eut surtout des chutes. Et des chutes. Et encore des chutes. La neige, c'est pas de la ouate, c'est un tas de cristaux pas bien agglutinés dont la surface cède sournoisement sous les pas. C'est une épaisseur dans laquelle la jambe reste fichée. Ou les deux jambes. Ou les jambes et le bras (ce bras dont vous pensiez vous servir pour vous relever, perdu dans la neige lui aussi). Ou les jambes et les fesses. Oui, oui, j'ai pris quelques bains de siège. 


Heureusement, il y avait les bâtons, enfin, le bâton. Des bâtons télescopiques, rapetissés et qu'on n'a pas réussi à ragrandir, mais même des bâtons au format piolet c'était précieux. J'ai trouvé. Moi. Pour ma part. Parce que, Pascale, elle n'avait pas besoin de tout ça. Elle volait sur la neige comme une écureuille. Si bien que, quand après l'avoir retrouvée un paquet de fois en creusant la neige j'ai eu perdu définitivement la fleur de mon bâton (comment ça s'appelle, le truc au bout?) et que le bâton il ne servait plus qu'à piquer la neige et à sonder sa profondeur, que je sondais par ailleurs déjà très bien avec les pieds, Pascale m'a gentiment passé le sien. Oui, on n'avait qu'une paire de bâtons pour nous deux... Bravo, les filles!


Ça m'a bien fait rire ces chutes à répétition. Sauf qu'au bout d'un moment, ça va quoi, on a compris le gag. Enfin, drôle, pas drôle, il fallait en sortir, de cette forêt maléfique. Et ne pas trop faire attendre mon chamois de partenaire, qui crapahutait gaiement malgré un genou tyrannique. Je l'admirais au loin et me désenneigeais une énième fois, me pressais et m'enfonçais de plus belle. Heureusement, la neige des tous derniers kilomètres étaient moins traître. Et nous savions la fin proche.

Quelle joie, au sortir de la forêt, de retrouver des routes boueuses dont le sol ne se dérobait pas! Après 5 heures de... de quoi au juste? disons 5 heures d'effort, on était contentes d'arriver. L'enfer est pavé de neige cristallisée. Mais c'était quand même une supra merveilleuse journée, l'enfer au paradis. 



D'autres photos ici: http://www.facebook.com/media/set/?set=a.10150664672459718.412802.519954717&type=3


Le métier qui rentre et les leçons tirées


①_Si tu veux faire du trail, entraîne-toi les bras.
Le trail, c'est aussi une affaire de bras. Ici, foin de semi-escalade à quatre-pattes comme à Orford,  mais les bras ont quand même bien bossé. À j+2, j'avais mal en coupant mes tartines. À cause du travail d'équilibre? (aussitôt que je voulais fouiller dans une poche, boire, remettre mes gants, paf, je tombais) à cause de efforts répétés pour me désenneiger? à cause du maniement des bâtons? à cause des gestes d'impuissance rageuse et de mes poings brandis au ciel?


②_Si tu veux faire du trail dans la neige, protège-toi les jambes. 
La neige n'est pas qu'une surface molle et ouateuse. La neige qui a un petit peu dégelé et un petit peu regelé, ça coupe. Je ne suis pas du pays, je ne savais pas. Partir en capri n'était pas l'idée du siècle. C'était ça le plus difficile, la douleur de cette lame de glace qui me scarifiait les jambes à chaque fois que je m'enfonçais. J+6, j'ai l'air d'avoir réchappé d'un attentat à la grenade. 


③_Par ici les économies
On a un petit moteur pas mal économique avec Pascale. Une moitié de gâteau énergétique en 5 heures, c'est pas mal. Pascale n'a en plus presque rien bu, juste une petite gourde de potion magique de Gatorade. 


④_Par ici la confiance
Pascale m'a dit que le trail d'Orford l'avait bien aidée pour son magnifique marathon de La Rochelle. Je tâcherai de m'en souvenir lors des prochains coups durs. "Je pourrais être au milieu d'une forêt, enfoncée dans la neige jusqu'aux genoux avec les jambes en sang." Trop facile de n'y être pas. 


⑤_Je veux essayer un trail qui se court et pas un trail qui n'est finalement qu'une randonnée pressée.


⑥_J'aime le bitume! J'aime le bitume. J'aime le bitume. J'aime le bitume. J'aime le bitume. J'aime le bitume. etc.

1 commentaire:

  1. Ca me donne envie d'y être toutes ces difficultés. Oui c'est pas toujours du courir les trails, ce qui est un peu frustrant pour nous mais il faut le savoir en partant et se le prendre comme une rando. Jeff

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